Très rapidement dans les prises en charge, je travaille sur le fait de mettre ensemble deux choses identiques, strictement ou non, puis, plus tard, des items qui ont un critère ou une fonction identique.
Un exemple du travail de « le même » apparait ici. Cette compétence est socle, elle permettra de manipuler beaucoup de notions par la suite.
Bref, très tôt, on va exercer la discrimination entre le « pareil » et le « pas pareil ». ATTENTION, comme souligné maintes fois ici, il faut être vigilant quant aux termes utilisés : on privilégiera le terme « différent » (plutôt que « pas pareil ») afin de ne pas faire apparaître la confusion liée à la négation.
Il y a des années déjà, je me suis rendue compte que contrairement à ce que l’on peut penser, l’enseignement du signe égal était vraiment facile à mettre en place. Les enfants le comprennent bien car ils prennent conscience que ça matérialise le sens de « c’est pareil », une des premières notions que l’on enseigne en rééducation cognitive.
L’intérêt de cet enseignement ? en mathématiques, mais pas que !
On peut s’étonner de l’enseignement de ce signe mathématique si tôt mais il va nous permettre de coder et de pouvoir échanger autour de propriétés avec des enfants qui sont en difficulté. On part du strictement identique puis, on va introduire la comparaison entre 2 objets on pourra introduire petit à petit la comparaison par rapport à un critère donné. Grâce à ce langage symbolisé on va pouvoir avoir accès à des comparaisons impossibles en temps normal avec des enfants présentant des troubles du langage importants.
Cette compréhension du signe « égal » va permettre de « coder » le pareil, et également de se préparer au futur langage mathématique. En effet, les études montrent depuis 20 ans que les enfants ont souvent des problèmes en calcul par mauvais enseignement de ce système d’égalité. En effet, ils le traitent souvent de manière opérationnelle (et non relationnelle) et donc, tout ira bien quand ils sont face à un calcul conventionnel du type « 4 + 5 = ? » mais ils n’acceptent pas la phrase mathématique « 9 = 4 +5 ». Ces études étant basées sur des neurotypiques, on peut aisément se dire que sur des personnes autistes moins flexibles, ça va être vraiment compliqué !
Le égal doit être compris comme une relation entre deux éléments et non comme une demande plaquée de résultats.
Sherman (2009) souligne qu’il est très profitable aux élèves de pouvoir manipuler : qu’ un exercice comparatoire proposé sous forme d’objets sera résolu plus rapidement, avec moins d’erreurs, plus de précision et de meilleures justifications quand aux procédures utilisées qu’un qui est proposé de manière symbolique ( c’est-à-dire en phrases mathématiques) mais surtout, que ces capacités acquises par les enfants leur permettaient d’accéder à des problèmes symboliques par la suite. Les auteurs concluent donc que « l’expérience avec des problèmes d’équivalence non symboliques va conduire à des améliorations en ce qui a trait aux problèmes d’équivalence symbolique ».
Bon, en résumé, si l’enfant manipule des objets pour traiter des opérations, il comprendra mieux et ce sera plus facile ensuite quand il aura des opérations en phrases mathématiques à résoudre. Donc, on y va, on va mettre en relation de vrais objets avant de passer au symbolique …
Voici donc des exemples d’activités à réaliser avec les enfants, et ce même si les notions mathématiques paraissent (encore) non abordables !
Pareil VS différent ?
Pour introduire facilement cette notion de pareil/différent, on manipule de vrais objets ou des images mais on ne passe PAS directement avec du papier-crayon et des concepts mathématiques.
Au début, on utilisera des objets qui sont strictement identiques et strictement différents et on verbalise le mot clef : « pareil » ou « différent ».
Sur les photos ci-dessous, le jeune dit « pareil » et on voit également qu’il signe (avec la Langue des Signes Française) le « c’est pareil » (deux index qui se tapent2 fois) et le « c’est différent » (qui commence par une croix avec les doigts qui s’écartent ensuite).Je ne lui ai pas appris, il le fait car je l’ai fait au début pour appuyer mon verbal.
Deux chaises strictement identiques. Le jeune signe ET verbalise : « pareil »
Avec des images strictement identiques ou différentes.
Pour les images, j’utilise des Memory où il y a toujours les illustrations en double.
Cela permet de bien voir si l’apprenant comprend le fait qu’on compare 2 éléments entre eux et cela aide également à la verbalisation (j’associe aussi systématiquement les signes en LSF « égal » et « différent »). Ces signes permettront aux plus grands d’acquérir du vocabulaire et de transférer les mots « égal / égaux / pareil / similaire / identique / semblable: … » ainsi que les mots : « différent / pas pareil / distinct/…
Avec des quantités strictement identiques ou différentes.
L’utilisation du tapis permet de bien isoler les deux éléments de la comparaison.
Avec des quantités semblables (non identiques) ou différentes.
Comme les manipulations ci-dessus étaient acquises, j’ai continué avec la jeune. EDIT octobre 24 : voici un PDF en noir et blanc.
Il s’agit de mettre ensemble des éléments qui ne sont pas identiques mais qui sont semblables. Vous trouverez dans ce PDF des exercices où il y a des strictement identiques et des semblables à comparer.
Ci-dessous, elle parvient bien à comprendre tous les types de configuration …
Vous pourrez prendre des jouets ou des objets de la vie quotidienne.
Pour faciliter les choses, vous pouvez utiliser un « tapis de comparaison » (dernière page du PDF) afin de bien cadrer l’activité. Puis, travailler sans ledit tapis.
Autres version, cette fois sans tapis :
Pareil ou différent : oui mais avec quel critère ?
Puis, une fois cela bien acquis, on va les comparer sous un critère particulier, qu’on va mettre en picto afin que l’enfant comprenne bien qu’on se réfère à quelque chose de précis et que la comparaison ce fait AU REGARD de CE critère.
En prenant d’autres supports :
Mais comparons ces ordinateurs :
Si on compare cette brouette bleue et cette pelle bleue :
Ensuite, toujours en utilisant le tapis de comparaison, le jeune va devoir placer parfois le signe mathématique (égal / différent), parfois le pictogramme du critère (au niveau de la couleur? de l’objet? de la quantité? …), et parfois, le jeune devra compléter le tapis par un objet qui répond aux consignes (par exemple, quelque chose qui est pareil en couleur) en face.
Ensuite, on a changé de support pour utiliser les vêtements de « dans ma valise » (le PDF sera à télécharger dans un prochain article 🙂 ) :
On recompare dans tous les sens, l’enfant doit parfois placer le bon vêtement, parfois le bon critère (la forme? la couleur? le motif? la taille?) , parfois le bon signe mathématique !!
Vous pourrez également vous baser sur des jeux que vous avez chez vous : Colorama, Match master, Un menu bien épicé, ou encore Catch it : tous ces jeux avec du matériel avec des couleurs différentes et identiques sont utilisables pour travailler ces comparaisons.
Si vous avez des doutes quant à l’accessibilité de ces exercices pour votre jeune, allez par là afin de le ré-entrainer à manipuler des critères différents.
Ci-dessous, voici une adaptation du jeu « Match Master » où l’enfant doit me dire (via les pictogrammes disponibles) si les collections sur les cartes sont similaires en quantité, en couleurs ou en animal.
On peut ensuite inverser l’activité : on met une carte et un signe égal avec un critère et on laisse plusieurs carte au choix pour l’enfant. Le jeune doit ensuite choisir parmi les X cartes celle qui correspond au critère évoqué.
En fonction des choix que vous laisserez, l’exercice sera plus ou moins facile.
Un PDF pour des exercices papier
Voici maintenant un format papier, qui interroge de différentes façons sur cette notion de pareil VS différent. Les conseils d’application sont en première page du PDF.
Quelques pages avec des objets strictement identiques : il faudra mettre un « égal » ou un « différent » :
Des pages où il faut mettre la bonne image, celle qui correspond au critère évoqué :
Des pages beaucoup plus complexes, où il s’agit de dire/ coder sur quel critère les items sont similaires : couleur, objet, forme ? (à l’aide de pictogrammes dessinés pour l’occasion !)
Ici, je travaille en mode « libre » sur des comparaisons afin que m’assurer que l’enfant n’a pas appris par cœur mais qu’il a bel et bien compris ce que je lui demandais.
Pour aller plus loin …
Afin d’aller plus loin dans cette notion, vous pourrez trouver des jeux intéressants tels que le jeu SET (un classique des orthophoniste) ainsi que le jeu de chez Imag’ines « qui se ressemble s’assemble » dont je parle dans cet article et que j’aime beaucoup utiliser dans tous les sens. Vous pouvez également reprendre le jeu « speed des habits » que vous pouvez télécharger sur la page citée plus haut ( là ) et avec lequel vous pourrez travailler avec des cartes deux par deux en demander à l’enfant quel est leur commun (quantité? couleur? objet (habit) ?)
J’ajouterai ici dans quelques temps les jeux que j’ai crées autour de ce thème. En attendant, si vous connaissez d’autres jeux du commerce, laissez un commentaire ! 😉